Depuis la crise des réfugiés de 2015-2016, la question migratoire est devenue l’un des principaux sujets de discorde en Europe. Même si le nombre d’arrivées irrégulières a fortement chuté depuis, les Etats membres de l’Union craignent de ne pouvoir faire face à un nouvel afflux de réfugiés. Afin d’aider les pays qui pourraient y être confrontés, les Vingt-Huit se sont entendus, en avril, pour accroître les effectifs de Frontex, qui vont passer de 1 300 à 5 000 en 2021, puis à 10 000 gardes frontières et garde-côtes en 2027. La Commission voulait aller plus vite, mais la montée en puissance de cette agence a suscité des réserves de la part de pays comme l’Italie, l’Espagne, la Grèce ou la Hongrie, redoutant qu’elle ne mette en cause leur souveraineté.
L’enjeu dépasse pourtant le simple cadre national. Si le continent ne garde pas mieux ses frontières, l’espace Schengen de libre circulation, l’un des principaux acquis de l’Europe, risque d’être menacé dans son existence. La projection jugée insuffisante des frontières extérieures a en effet déjà poussé plusieurs Etats, dont la France, à réintroduire des contrôles temporaires à l’entrée de leur territoire. Afin que des pays comme l’Allemagne, la Grèce ou l’Italie ne se retrouvent pas seuls à devoir gérer ce défi, Emmanuel Macron a proposé, en mars, de “remettre à plat” Schengen, quitte “à ce que ce soit avec moins d’Etats”. Selon le président français, cet espace va de pair avec une harmonisation – pour l’heure dans l’impasse – des règles d’accueil des demandeurs d’asile dans l’Union. “En clair, les Etats qui n’assureraient pas des contrôles rigoureux aux frontières extérieures ou leur part de solidarité en matière d’asile ne pourraient plus participer à Schengen”, décrypte Yves Pascouau, de l’Institut Jacques-Delors et coordonnateur du projet Migrations en Question. D’après ce spécialiste, la mise en oeuvre d’un tel plan se heurterait à plusieurs obstacles. “On ne peux pas exclure un Etat de Schengen ni rétablir les contrôles aux frontières sans respecter des procédures précises.” Le consensus n’est pas pour demain. R. Ro.
Article paru dans la version papier de hebdomadaire numéro 3542 de l’Express.
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